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FEMINISTES CONTRE LE SIDA |
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Il veut la faire expulser pour prendre une autre épouse
Hami a rencontré son futur conjoint en Guinée, son pays d'origine. Il est lui aussi d'origine guinéenne, mais vit depuis de longues années en France et possède la nationalité française. La rencontre s'est faite par l'intermédiaire de la sœur de celui-ci, qui s'est montrée très active pour convaincre Hami que son frère est un excellent parti. Il est assez pressé de se marier parce que son ancienne femme est décédée et qu'il se trouve seul pour élever trois enfants. Hami ne veut pas aller trop vite et veut être sûre qu'il est l'homme qui lui convient. Elle lui demande d'attendre qu'ils se connaissent mieux. Il fait donc plusieurs fois l'aller-retour entre la France et la Guinée et emmène une fois ses enfants avec lui pour organiser une rencontre. Finalement le mariage est célébré en Guinée en mars 2001. Peu de temps après, Hami arrive sur le territoire français et obtient en mars 2002 une carte de séjour en tant que conjointe de Français. Les relations du couple sont mauvaises : Hami se rend rapidement compte qu'il l'a épousée uniquement pour qu'elle s'occupe de la maison et des enfants, ce qu'il est incapable de faire seul. Hami lui fait comprendre que, bien qu'elle soit très attachée aux enfants, elle refuse d'être traitée comme une nourrice ou une femme de ménage. Il commence à la battre, ce qui l'oblige à se rendre aux urgences et à déposer une main courante. Il exerce un harcèlement moral à son encontre, lui apprend qu'il envisage de demander le divorce et qu'il fera tout pour qu'elle soit expulsée de France. Au moment du renouvellement de son titre de séjour, la préfecture informe Hami que son époux a déclaré qu'il n'y avait plus de vie commune entre eux. Pour ce motif, la préfecture apprend à Hami qu'elle engage une procédure de refus de renouvellement de son titre de séjour. Avant de prononcer définitivement sa décision, la préfecture souhaite prendre l'avis de la commission du titre de séjour. Hami est donc convoquée devant cette commission pour expliquer en détail sa situation. C'est à ce moment qu'elle contacte notre association. Nous décidons de l'accompagner pour expliquer que, bien que Hami soit violentée par son époux, il n'y a pas de rupture de la vie commune. De nombreux justificatifs sont présentés qui attestent que les deux époux vivent toujours au même domicile. Après délibération, la commission émet un avis favorable au renouvellement du titre de séjour d'Hami puisque le motif du refus, à savoir la rupture de la vie commune, se fonde sur un mensonge de l'époux. Les choses semblent donc se régler pour Hami qui est convoquée quelques mois plus tard à la préfecture pour y retirer sa carte de résident. Mais ce jour-là, la préfecture l'informe qu'elle ne lui sera pas délivrée parce que l'avocate de son époux a fait parvenir à la préfecture une ordonnance de non-conciliation, préalable à la procédure de divorce. Cette ordonnance de non-conciliation signifie que les conjoints sont séparés et permet donc à l'administration d'opposer un nouveau refus à Hami, toujours au motif de l'absence de vie commune. Cette fois, cette absence de vie commune est réelle, car Hami n'a pu se résoudre à rester plus longtemps au domicile conjugal. Nous entreprenons un recours contre cette décision, en nous fondant sur le fait que la rupture de la vie commune est due aux violences conjugales, mais, en attendant une nouvelle décision de l'administration, Hami risque de perdre son travail. Quelques semaines plus tard, Hami vient nous voir. Elle s'est toujours montrée extrêmement combative et déterminée à ne pas être doublement victime de son époux qui l'a battue et qui essaye en plus de la faire expulser. Mais cette fois-ci elle a l'air abattu : elle vient d'avoir les résultats d'un test qui lui apprennent qu'elle est séropositive. Après avoir questionné son entourage, elle apprend que son époux est lui aussi séropositif depuis plusieurs années. Il a contaminé sa première épouse qui en l'apprenant a mis fin à ses jours, malgré la présence de trois enfants. Elle apprend aussi qu'il a déjà décidé de trouver une autre épouse (la troisième) dès que le divorce sera prononcé. Sa sœur qui avait servi d'entremetteuse en Guinée est déjà sur une piste…
Extrait de Femmes et étrangères : contre la double violence - Paris : 2004, p. 44-46.
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6 janvier 2006 |
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